KENWA MABUNI

Au moment où la modernisation des politiques du nouveau gouvernement Meiji du Japon s'établissait après 280 années de régime shogun, Kenwa Mabuni vit la lumière du jour pour la première fois à Shuri, Okinawa. Le fondateur du Karaté Shito-ryu vint au monde en novembre 1889.

Kenwa était un descendant de la 17ième génération de Kenyu Oshiro, un des plus braves guerriers du royaume Ryukyu, mais Kenwa lui-même avait cependant une frêle constitution lorsqu'il était enfant. Sa famille, anxieuse de sa fragilité, lui racontait des histoires héroïques à propos de ses braves ancêtres. Kenwa voulait lui aussi être fort.

Le célèbre Maître Ankô Itosu habite aussi à Shuri. A treize ans, Kenwa Mabuni, introduit par un de ses amis, devient son élève ; il lui restera fidèle toute sa vie. Selon la coutume de l’époque il a dû obtenir, pour être admis, la recommandation d’une personne sûre qui se porte garante. Il persévère dans son entraînement sous la direction d’ Ankô Itosu sans jamais manquer un seul jour, pas même un jour de typhon, selon l’expression de son fils Keneï Mabuni.

En 1902 il entre au lycée départemental d’Okinawa où le karaté n’est pas encore enseigné. En 1905, à la suite d’un mouvement de grève des lycéens auquel il a pris une part importante, il doit changer d’école et entre à l’école maritime. Il y termine ses études au bout de trois ans, à 19 ans.

A l'âge de 20 ans, alors qu'il travaille comme enseignant vacataire à l'école primaire de Naha, Kenwa Mabuni étudie l'art du Naha-te sous la direction de maître Kanryô Higaonna auquel son ami intime Chojun Miyagi (futur fondateur de l'école Goju-Ryu) le présente. Il s'entraîne pendant 2 ans mais doit faire son service militaire, et à son retour, en 1912, entre dans la police. Il devient inspecteur de police en 1914, à 25 ans. Sa fonction de policier facilite ses déplacements dans l’île d’Okinawa, et ses rencontres avec des Maîtres de l’art du combat. Il peut ainsi recueillir de nombreux katas de karaté Il étudie en outre les arts classiques de l’île appelés Ryû-kyû kobujutsu. C’est ainsi qu’il apprend le bô-jutsu (l’art du bâton) de maître Aragaki et de maître Soeishi et le saï-jutsu (l’art du saï) de maître Tawada. 

Les deux maîtres Ankô Itosu et Kanryô Higaonna meurent la même année, en 1915;. Kenwa Mabuni n'a que 26 ans. Malgré son jeune âge, il décide avec Miyagi de constituer un groupe de recherche et de pratique du karaté. Trois ans plus tard, en 1918, la plupart des karatékas connus d'Okinawa en font partie. Nous y trouvons, auprès de C.Miyagi et K.Mabuni les principales figures de l’histoire du karaté moderne:K. Yabu, C. Hanashiro, C. Chibana, A. Tokuda, S. Gusukuma, C. Oshiro, S. Tokumura, S. Ishikawa, G. Funakoshi.   

Mais ce groupe ne dispose pas d’un dojo et ses membres ne vont pas très loin dans la collaboration pratique. C’est seulement en 1924 que K. Mabuni construit un dojo dans son jardin. Le nouveau groupe qui travaille avec lui est dirigé par les maîtres : C. Miyagi, J. Kyoda, C. Motobu, C. Hanashiro, C. Ôshiro, C. Chibana, K. Go (chinois).   

Lorsqu’en 1926, Jigorô Kanô, une des plus grandes figures du budo japonais de l’époque, visite Okinawa et demande au préfet une présentation du karaté, c’est ce groupe qui prend l’initiative des démonstrations. L’explication du Shuri-té est faite par Mabuni, celle du Naha-té par Myagi. Les karatékas d’Okinawa de l’époque y voient un événement d’importance vitale pour le développement ultérieur du Karaté.

A l’issue de cette présentation, J. Kanô dit à K. Mabuni et à C. Myagi :Je pense qu’au point de vue de l’éducation physique et morale l’art du combat d’Okinawa doit être développé à très grande échelle dans l’avenir. Lorsqu’il aura atteint un certain degré de diffusion à Hondo (île principale du Japon), il aura naturellement une chance de s’intégrer au Butokukaï. Je voudrais que vous teniez compte de cette question et que vous considériez votre art du point de vue global du Japon.

C’est cet entretien avec J. Kanô qui décide K. Mabuni à quitter Okinawa. En 1928 il part seul pour Tokyo et rend visite à J. Kanô. G. Funakoshi déjà installé à Tokyo depuis plusieurs années l’accompagne. J. Kanô, membre d’une commission du Comité international olympique, partira la même année assister aux jeux olympiques à Amsterdam.